L’ artiste en milieu urbain, nourrit son imaginaire fécond de tout ce qu’il voit autour de lui. Il en explore la moindre parcelle avec appétit et en fait son terrain de jeu. Le jeune Parisien dynamique passe une partie de son temps non négligeable dans le métro souterrain riche d’une centaine d’années d’histoire et d’anecdotes
Comment ne peut il pas l’ intégrer à sa propre aventure et peupler ses carnets d’ une faune aussi diverses et étranges que celle rencontrée dans le métro de Paris ??!
Et Comment résister à la possibilité de transformer une plage de temps oisif en un jeu qui te fera remplir du carnet a gogo ? Impossible ! Dessiner tout et n’importe quoi n’importe où fait partie de l’ adn du dessinateur…
Armé de son fidèle col erase, il s’en va jour après jour, pénétrer la jungle tentaculaire des lignes de métro, avec en tète la quête un peu folle et vaine de compléter le plus de petits carnets possibles.
Le dessinateur qui s’aventure dans les entrailles de paris développe dans son cœur trois grands principes fondamentaux qui lui permettent de creuser plus encore l’art de croquer le chaland.
Furtivité
Assiduité
Humanité
Tout le monde connaît bien sûr le fameux adage, que l’on perturbe nécessairement un élément que l’on observe. Comme un reporter animalier dans la savane qui essaye de passer incognito, Toute l’ expertise du dessinateur est de savoir observer sans que sa victime ne s’en rende compte, pour capturer pour ainsi dire, l’ essence même du personnage.
La pratique continue du dessin d’ observations constitue la base de travail pour le dessinateur un peu sérieux. Les gammes que sont le dessin de personnages disposés façon foule et les rames en perspectives assurent de solides fondations techniques et une connaissance devenue inconsciente du monde qu’ on esquisse.
Le dessiner le premier venu, s’il est fait avec cœur, nous force à un effort altruiste d’ empathie. Pour rendre au mieux telle ride, ou expression sur sa feuille, il faut s’ imaginer toute une vie qui se cache derrière, une humeur, une pensée, un souvenir joyeux qui peuple la conscience anonymisée par la multitude… Il faut intérioriser le personnage, lui donner une dimension spirituelle, la peupler un peu d’ une âme.
Le dessinateur urbain déploie toute son ingéniosité pour autant que son environnement se complexifie et il étend des compétences techniques pour le moins extraordinaires pour répondre aux exigences de son train de vie précédemment décrit.
Tout d’abord il a une conscience aiguë de ce qu’on appelle pompeusement (c’est le titre de cette chaîne) le punctum proximum de l’observateur. Toute personne ayant une vision directe sur son carnet ne doit pas être dessinée.
Le croqueur utilise la Feintise en balayant l’ ensemble du wagon a 180 degré exactement pour brouiller les pistes à savoir qui est sa cible. En réalité, dessiner plusieurs personnes en même temps permet d’appliquer à bon escient ce mécanisme.
Il faut consacrer tous ses effort à sa tâche, rester focus, dans sa bulle de mangaka et ne pas se laisser distraire par les badauds,
Deux axes de compensations aux remous de la rame sont maîtrisés au niveau du poignet et des jambes car il faut pouvoir dessiner sans se tenir à la barre. Un excellent sens de l’ équilibre et une lecture infaillible des cahots du wagon pour anticiper et compenser voire suspendre le trait sont nécessaires pour survivre dans un milieu aussi hostile à la finesse !
Parfois le dessin est avorté si la personne descend à la station suivante. Il faut être vif, rapide dans l’ exécution ou modéliser à l’ avance les points d’intérêt pour compléter le dit sketch par l’imagination.
Plusieurs règles tacites découlent des précédents points.
Il ne faut jamais croiser le regard de ses victimes, sinon le charme du dessin dérobé contre son gré perd de son charme.
On engrangé des points bonus si on capture un lecteur, un dessinateur en train de dessiner. J’ai dû en attraper moins de 10 dans toute ma carrière et je considère que c’est le plus grand privilège qu’on a sur un autre dessinateur…l’ ironie ultime, l’ élégance des élégances.
A quoi ressemble un carnet de métro…Tout d’ abord il est rempli de jolies filles, car elles représentent la beauté même. Ces 10 dernières années il est devenu impossible de croiser le regard d’ un étranger car leur yeux sont exclusivement vissés sur leur téléphone portable et leur oreille offerts à des écouteurs plus ou moins encombrants.
Des parisiens qui font la gueule, c’est une des spécialités du pays, qui n’a pas sa collection de grimaces tordues imperturbables a raté son carnet de dessin.
On recueille les sales gueules de pierres tombales ambulantes ou metroportes. Pour varier les plaisirs j’aime bien aussi anthropomorphiser la population qui me tombe sous le crayon… C’est un cartoonisme fringuant qui donne un peu de fraîcheur quand la lassitude nous gagné.
Plusieurs lignes de métro sont favorables à cette activité cavalière. Mes préférences vont aux lignes touristiques ou les lignes modernes et confortables.
L’ art du croquis de métro n’a maintenant plus de secret pour vous, la prochaine fois que vous croiserez un dessinateur remémorez vous toute la technicité que requiert cette activité d’apparence si insignifiante.
